LES POITRINES DES HOMMES LIBRES SONT LES TOMBEAUX DES SECRETS صدور الأحرار قبور الأسرار

samedi 22 juin 2019

Y. B. : Un extrait des APERÇUS SUR LE « RETOURNEMENT » (CHAPITRE XII)










CHAPITRE XII

LE « SCEAU DE SALOMON »
ET
L’ARCHÉOMÈTRE




Dans l’orientation vers l’Est qui correspond à Al-Islâm (Karma-marga) et qui s’applique à la « Station Mohammadienne » : l’Est correspond à l’intérieur et à Muhammad (Sirr) ; l’Ouest à l’Extérieur et au Christ (Rûh) ; le Sud, qui est à droite, correspond au Premier et à Umar (Çadr) et le Nord, qui est à gauche, au Dernier et à Abu Bakr (Qalb). Ibn Arabî correspond à Huwa et à la nafs natiqah qui est en relation avec la Kamaliyyah, ce qui est conforme aux indications fournies par Mr Gilis (1).
Guénon a écrit dans le Roi du Monde que le nombre 5 avait une importance fondamentale dans la tradition extrême-orientale et on pourrait en dire autant de l’Islam : les 5 piliers de l’Islam, les cinq prières (2), les 5 formules rituelles (3), les 5 tahlil coraniques (4), les 5 arkan, etc., sans mentionner les racines coraniques qui sont en relation avec le nombre 5 : les 4 mois sacrés et le mois de Ramadân, les 4 livres sacrés et le Coran (le 5ème Véda, le 5ème King), etc. …
Selon Guénon,
« la réalisation architecturale est considérée comme une “hypogée” qui se ramène au symbolisme de la caverne comme une image de l’ensemble du cosmos »,
et la caverne est comme une « matrice » qui est désignée en arabe par la racine RHM dont est formé le mot Rahma (Miséricorde). Lorsque Allâh dit : « Rahmatî sabaqat Ghadabî », la Miséricorde (Rahma) est en rapport avec la droite et la Colère (Ghadab) avec la gauche, bien que si la Miséricorde précède (sabaqat) la Colère, c’est parce que la Colère « procède » de la Miséricorde qui l’emporte (ghalabat). D’autre part, on peut également dire que la Miséricorde est en rapport avec l’avenir qui est « devant » (Bâtin) et la Colère avec le passé qui est « derrière » (Zhahir). Enfin, on peut établir une correspondance d’une part entre la Miséricorde et la Colère et d’autre part, entre le Zénith et le Nadir, car al-ghadab désigne aussi une pierre très dure (Imâm Jazûlî) qui peut être considérée comme la « pierre fondamentale » de la création en tant que principe de contraction ou de solidification (5). On pourrait établir une correspondance entre le Ciel de Saturne (Abraham) et le nom divin Ar-Rahmân, et entre le Ciel de la Lune (Adam) et Al-Ghadab. Dans cette nouvelle application du « Sceau de Salomon », l’orientation est prise en se tournant vers le Sud, c’est-à-dire que Jupiter correspond à Al-Bâtin et Mercure (Nord) à Azh-Zhâhir. Le Soleil symbolise le Soi (Huwa) qui correspond à la « Voie du Milieu » désignée par le verbe sabaqa dans la Parole d’Allâh.
Il existe aussi une représentation du « Sceau de Salomon » où les positions de la Lune et du Soleil sont interverties et à cet égard, Tamos fait remarquer que les « douze signes du Zodiaque sont les domiciles des sept planètes ; chaque planète a un domicile diurne et un domicile nocturne, sauf le Soleil et la Lune qui n’ont qu’un seul domicile chacun. Le Soleil étant considéré comme essentiellement diurne et la Lune comme essentiellement nocturne, les planètes diurnes et nocturnes alternent régulièrement sur le parcours de la circonférence » (6).

Ce qu’il nous importe de souligner ici, c’est que dans cette nouvelle représentation du « sceau de Salomon », qui a la Lune comme pôle, Jupiter correspond au Nord (Bâtin) et Mercure au Sud (Zhâhir), tandis que Mars (Ouest) est à gauche (Al-Akhir) et Vénus (Est) à droite (Al-awwal), ce qui implique que l’orientation est prise en se tournant vers le Nord, bien que cette disposition des points cardinaux s’applique également quand l’orientation est prise en se tournant vers l’Est (7).
L’ensemble formé par les deux « sceaux de Salomon » reproduit les douze signes du Zodiaque
« à l’intérieur duquel se meuvent les planètes [et] qui constitue véritablement l’“enveloppe” du Cosmos »,
c’est-à-dire le « cadre céleste » qui a pour fonction principale
« de maintenir à leur place les divers éléments qu’il contient ou renferme à son intérieur, de façon à en former un tout ordonné »
dont la signification la plus profonde est en relation avec le symbolisme du sûtrâtmâ, le « rayon solaire » reliant « tous les états de l’être entre eux et à son centre total » (8).
« le symbolisme du soleil comme « “Cœur du Monde” explique d’ailleurs pourquoi le sûtrâtmâ qui relie chaque être au Purusha central est alors représenté par le “rayon solaire” appelé sushumnâ. Les diverses représentations du sûtrâtmâ montrent aussi que la division apparente de Purusha, dans l’ordre “macrocosmique” aussi bien que dans l’ordre “microcosmique”, ne doit pas être conçue comme une fragmentation qui serait en contradiction avec son unité essentielle, mais comme une “extension” comparable à celle des rayons à partir du centre ; et en même temps, comme le sûtrâtmâ est assimilé à un fil (sûtra) par sa désignation même, ce symbolisme est aussi en rapport étroit avec celui du tissage » (9).

Dans une étude comme celle-ci, il n’est évidemment pas possible d’envisager tous les aspects de l’unité dans la multiplicité telle qu’elle est présentée ici, mais ceux qui reliront l’œuvre de René Guénon n’auront sans doute aucune peine à se rendre compte que l’Archéomètre y joue le rôle d’un yantra, et qu’il permet de dégager toute une doctrine de l’« unicité de l’existence » qui est en relation étroite avec la fin des 7 premiers manvantaras (10).









NOTES




(1) René Guénon et l’avènement du troisième Sceau, ch. III. Dans l’orientation vers le Sud, celui-ci correspond à l’Intérieur et le Nord à l’Extérieur. L’Orient (Premier) et l’Occident (Dernier) sont seulement intervertis. Cette orientation correspond à Al-Imâm (Bhakti-mârga). On peut remarquer que la connexion entre la foi et l’amour est en relation avec la fonction « royale » de la divinité car la foi du commun c’est de « croire » que Dieu gouverne le monde ; c’est là aussi une des raisons pour laquelle la véritable élite, celle qui ne s’expose pas, se confond extérieurement avec le peuple. Ces différentes orientations sont en rapport avec les « clés » des Futûhât et le symbolisme des « Jours » tel qu’il est exposé par Ibn Arabî et Qâchânî, mais il semblerait qu’elles peuvent également s’appliquer à la grammaire arabe.
(2) La çalât (prière) du matin (Çubh) correspond à l’Est (Premier), celle de midi (Zuhr) au Sud (Extérieur), celle de l’après-midi (‘Açr) au Centre, celle du coucher du soleil (Maghrib) à l’Ouest (Dernier) et celle de la nuit (‘Ishâ’) au Nord (Intérieur). La çalât al-‘Açr est la prière du milieu (çalât al-wusta) et la clé akbarienne, correspondant à la sourate du Coran intitulée Al-‘Açr, traite de « la Demeure de l’Union et de la fonction revenant à un seul de représenter l’ensemble » (ch. 281 des Futûhât).
(3) Les Sept Etendards du Califat, p. 88.
(4) Le Coran et la fonction d’Hermès, p. 10.
(5) Il existe un certain nombre de termes péjoratifs dans le Coran qui ont un sens ésotérique et qui peuvent être mis en relation avec cette question (M. Chodkiewicz : Un Océan sans rivage, p. 74). Toutefois, c’est l’expression Zhalûmân Jahûlân qui est la plus centrale (Cor. 33, 72 – le nombre 72 est un symbole universel qui se retrouve au sein de toutes les traditions (cf. Lenain ; La Science Cabalistique, Paris 1982) et qui est en relation avec le symbolisme maçonnique du cable-tow. Dans le Coran, il correspond à la sourate intitulée Al-Jinn, c’est-à-dire, les facultés subtiles individualisées, et la clé akbarienne correspondante traite de « la demeure de la Modalité de la descente de la Révélation (al-wahy) sur les cœurs des Saints, et la sauvegarde de ceux-ci contre les diables, fait partie de la dignité mohammadienne » (trad. M. Vâlsan).
Suivant la tradition arabe, « Allâh a créé Adam selon Sa forme » ou « selon la forme du Miséricordieux (ar-Rahmân) », précision qui permet de « localiser » cette création au Ciel de Saturne. Ainsi, la « chute » du père de l’humanité se serait accomplie par l’« Axe du Monde » du Ciel de Saturne à la sphère lunaire « qui est proprement le “monde de la formation” ou le domaine de l’élaboration des formes dans l’état subtil, point de départ de l’existence en mode individuel » (Symbole de la Science Sacrée, ch. XIX, p. 135).
(6) La Gnose, juillet-août 1910, p. 183. On sait que l’Archéomètre est en relation avec la « science des lettres » conçue comme une synthèse entre l’alphabet Vattan, écriture primitive des Atlantes, et l’alphabet arabe dit « solaire » (L’Islam et la fonction de René Guénon, p. 120 à 126).
(7) Dans la hiérarchie du « Pôle céleste » de l’Islam, la relation entre Abu Bakr as-Siddiq (Nord) et la planète Jupiter est confirmée par une note de Guénon : « Tsedeq est aussi le nom de la planète Jupiter, dont l’ange est appelé Tsadqiel-Melek la similitude avec le nom de Melki-Tsedeq (auquel est seulement ajouté El, le nom divin qui forme la terminaison commune de tous les noms angéliques) est ici trop évidente pour qu’il y ait lieu d’y insister. Dans l’Inde, la même planète porte le nom de Brihaspati, qui est également le “Pontife céleste” » (Le Roi du Monde, ch. VI, note 1, p. 55).
En ce qui concerne la hiérarchie des Piliers (Awtâd) de la Tradition pure (ad-Dînu-l-Hanîf), la connexion entre Khidr et le Nord se réfère également au Ciel de Jupiter. Idrîs pourrait être mis en correspondance avec Mercure qui est au Sud et dont la Station est celle de l’homme ; et Ilyâs à l’Est car son nom est formé à partir d’une racine (yâs) qui désigne le désespoir comme celui de Yûsuf (Vénus) est formé à partir d’une racine qui signifie la tristesse (asaf) (Cor. 12, 84). Ainsi ‘Aîsâ correspond à l’Ouest, comme dans la Station muhammadienne et au Ciel de Mars qui est en rapport avec David car le Messie de la Kabbale est le fils de David et le Christ (‘Aîsâ) descend de la tribu royale de Juda.
(8) Symboles de la Science Sacrée, ch. LXV.
Les aspects nocturne (layla) et diurne (nahar) du cycle journalier (yawm) sont respectivement en correspondance avec la circumambulation « polaire » (Centre à gauche) et la circumambulation « solaire » (Centre à droite). Dans le premier cas (prédominance de la nuit – ténèbres –), la gauche est à l’« intérieur »  et la droite à l’ « extérieur », et dans le second (prédominance du jour), la gauche est à l’« extérieur » et la droite à l’« intérieur ».
(9) Ibid., ch. LXXV.
(10) Formes traditionnelles et cycles cosmiques, p. 15.



















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