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jeudi 5 mars 2009

SHAYKH AL-‘ALÂWÎ










SHAYKH AL-‘ALÂWΠ
Minhâj al-taçawwuf 

 La voie du Taçawwuf
Épitre sur la voie soufie
 

 
 

 

 

D. Tournepiche, collaborateur à VLT depuis quelques années, vient de faire paraître aux éditions Albouraq une traduction de la dernière partie d’un ouvrage en vers du Sheikh A. Ibn-Mustaphâ al-‘Alawî ; Al-risâla al-‘alawiyya fî ba’d min al-masâ’il al-shar‘iyya, (Épître sur la voie soufie). Ce texte, ainsi que l’explique le traducteur dans sa présentation, est une synthèse des vérités doctrinales, des règles rituelles, des méthodes et de l’adab qui se doivent d’être comprises et mises en œuvre par le murîd (disciple) ayant reçu l’initiation (pacte initiatique). Nous saluons l’initiative de Tournepiche d’avoir fait publier le texte original en regard de sa traduction, qui ne présente aucune difficulté particulière pour un lecteur francophone ayant les connaissances de base de la grammaire arabe. Afin de bien préciser les intentions du Sheikh ‘Alâwî, le traducteur a reproduit un extrait de la préface que celui-ci rédigea pour son traité al-manh al-quddûssiyya (le don sanctifié) :

« (…) Le sage parmi les soufis a dit : Il y a une grande différence entre celui qui est conduit par [cette vision directe] et celui qui s’en enquiert à son sujet. Les tenants de toute science particulière s’affrontent et disputent entre eux tandis que leurs représentants attitrés s’opposent et se contredisent. Ce n’est pas le cas de cette noble science, pure de divisions et d’altérations ».

 En effet, C’est en principe toute la différence entre le point de vue de la théologie et celui de la réalisation spirituelle par le dévoilement et la connaissance directe ; l’un dépend de l’activité limitée et discursive de la raison, l’autre s’est définitivement affranchi des conditionnements de la conscience ordinaire. C’est ainsi que la foi en la Révélation de l’Islâm et en son Envoyé, par la ferveur du « Grand Jihad », se transforme en Connaissance. Le texte lui-même se compose de 132 distiques (qui perdent hélas la sonorité de leurs rimes une fois traduits) annotés par de longs et nombreux commentaires que certain jugeront sans doute un peu denses. Cependant, comme il s’agit d’une traduction et par conséquent d’une interprétation, Tournepiche a choisi, en se référant à différentes sources, d’expliciter intellectuellement l’enseignement du Sheikh par des développements surtout profitables aux familiers des œuvres de R. Guénon et M. Vâlsan. Le sheikh ‘Alâwî aborde les aspects essentiels de l’intention spirituelle et de la pratique au sein de la tariquah. Dés les premiers vers, la voie (tarîq) est définie comme « la réalisation effective du lien fondamental qui l’unit à l’Elu », c’est à dire du Prophète Mohammad (‘a s) lui-même. C’est par le sheikh-murshîd que s’établit le rapport vivant à la Loi sacrée et sa Fin ultime qui est Vérité absolue. « Les gens du banc » (ahl al-sâfâ) sont mentionnés, et, ainsi que le commente le traducteur, le Sheikh fait allusion à l’homonymie entre les termes arabes çuffa (banc) et çafâ (être pur) ; le terme taçawwuf (que l’on traduit en général de façon fautive, par mystique) se compose en effet des mêmes lettres çad, fâ et waw. Donc, « La compagnie du sheikh est obligatoire », « L’intention droite » et « l’orientation permanente », « l’accomplissement des rites obligatoires », « l’effort (ijtihâd) » sont envisagés comme la définition même du murîd (le disciple initié) ainsi que la considération de ce dernier à l’égard de son frère dans la voie, que l’on retrouve d’ailleurs  dans toute la spiritualité islamique. La place centrale revient sans aucun doute au murshîd et à l’éducation (adab) dont il est le support incontournable.

Cependant, si l’adab du disciple envers le maître est généralement assez bien compris, il en va différemment des qualités du maître spirituel car celles-ci demeurent inexplicables sinon par cette éducation (adab) reçue de l’irshâd. En effet, ce sont les ressources spirituelles maintenues par l’organisation traditionnelle de la vie sociale qui garantissent l’état d’esprit et le désintéressement dans la préparation et l’approche du disciple et, pour le Sheikh, « L’adab du Maître envers le disciple ». Ce dernier point a son importance car lors de l’initiation, le pacte contracté par le disciple le lie en retour à l’accomplissement spirituel de ce dernier.

Le Sheikh ‘Alâwî écrit que le murshîd

 «  (…) Excelle dans les relations sociales et domestiques. Clément pour les grands comme pour les petits, / S’occupant du riche comme du pauvre. Il donne à tout ce qui possède un droit (dhî haqq) les conseils qui lui reviennent, /avec sévérité comme avec douceur. Il contrôle la purification des cœurs / en leur commandant le dhikr et la discipline spirituelle (al-riyâda). Il les préserve dans leur parcours autant qu’il le peut / jusqu’à ce que son disciple arrive à son seigneur et maître (mawlâhu) ».

Le contenu de ce traité nous conduit vers les difficultés posées par la tendance accélérée vers la dissolution de toutes les formes traditionnelles. Dors et déjà, étant donné que pratiquement plus personne n’est en mesure de souscrire aux qualifications requises qui fondent le point d’appui nécessaire du disciple né en Occident moderne et susceptible de recevoir régulièrement la guidance, comment pourrait-il y avoir une présence opérative des Maîtres qui soit, à l’instar du Sheikh ‘Alâwî, plus qu’une simple « activité de présence » ?

 










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