ENSEIGNEMENTS
DU ROI
TSONG TSEN GAMPO
(Extraits)*
Les enseignements du Roi TSONG TSEN GAMPO, « Gardien du Dharma » et « Manifestation de
Tchenrezi » se présentent en quarante chapitres, chacun étant composé de
trois sentences.
Chapitre : Les dix Dharma du rejet des fautes
et de
l’adoption des vertus
1 – Les trois Dharma qui détournent les moines de la
voie
(Concerne surtout les moines mais aussi les « laics ».)
– Si, critiquant le sens du Vinaya, la discipline, nous ne gardons pas les vœux correspondants, voilà le Dharma qui détourne de la voie.
– Si, critiquant le sens des Sutra, nous ne lisons pas pour soi et si nous ne récitons pas pour les autres, voilà le Dharma qui détourne de la voie.
– Si, critiquant le
sens de l’Abhidharma, nous n’aspirons
pas à la connaissance du sens profond, voilà le Dharma qui détourne de la voie.
2 – Les trois Dharma atteints par les démons
– Si, alors que nous
ne mettons pas en pratique le Dharma,
nous manifestons de l’orgueil, de la vanité (en se contentant de débattre),
voilà le Dharma qui empêche la
pratique, qui seule procure la maitrise de l’esprit.
D’après Sakya Pandita : « On reconnait le vrai savant à la maitrise de son esprit dompté ».
– Si, le méditant est distrait par la poursuite de biens (matériels), c’est alors le Dharma entaché par les poursuites du démon.
– Si, le
« disciple » est habile dans les apparences, mais qu’au fond de
lui-même, il ne demeure pas dans le respect des vœux, c’est alors le Dharma entaché par le démon.
3 – Les trois Dharma dépourvus de sens
– Si, en vue de l’acquisition de la renommée, nous amassons richesses et jouissances, c’est alors le Dharma dépourvu de sens.
– Si, en vue d’obtenir des richesses, nous trompons autrui, c’est alors le Dharma dépourvu de sens.
– Si, en vue d’obtenir de la nourriture, vous manifestons de l’avidité, alors le Dharma dépourvu de sens.
4 – Les trois Dharma en accord avec les Paroles du Bouddha
– Si, abandonnant la recherche de notre propre esprit, nous recherchons ailleurs que le Bouddha, voilà le Dharma en contradiction avec les Paroles du Bouddha.
– Si, laissant les êtres de côté, nous recherchons l’acquisition des vertus et des mérites ailleurs (i.e. dans un objet autre), voilà le Dharma en contradiction avec les Paroles du Bouddha.
– Si, délaissant nos
parents, nous développons la gratitude envers d’autres personnes, voilà le Dharma en contradiction avec les Paroles
du Bouddha.
5 – Les trois Dharma dépourvus de risque d’erreur
– Si nous sommes capables de Refuge constant dans le Lama et les trois Joyaux, nous possédons alors le Dharma dépourvu de risque d’erreur.
– Si nous sommes capables de rejeter fermement les dix « non-vertus »*, nous possédons alors le Dharma dépourvu de risque d’erreur.
* Les dix « non-vertus » :
- 3 non-vertus du
corps : prendre la vie d’un être vivant, prendre ce qui n’a pas été donné,
avoir des relations sexuelles inappropriées.
- 4 non-vertus de la
parole : mentir, médire, proférer des paroles blessantes ou grossières,
des paroles vaines.
- 3 non-vertus de l’esprit : pensées malveillantes, pensées envieuses, pensées fausses.
– Si nous sommes
capables de servir constamment le Lama avec notre corps, notre parole et notre esprit, nous
possédons alors le Dharma dépourvu de
risque d’erreur.
6 – Les trois Dharma en accord avec les Paroles du Bouddha
– Si, de notre corps, nous gardons les vœux pris lors des Refuges ou des Initiations, nous possédons alors le Dharma en accord avec les Paroles du Bouddha.
– Si, de notre parole, nous sommes capables de réciter les mantra et prières, nous possédons alors le Dharma en accord avec les Paroles du Bouddha.
– Si nous sommes
capables de placer l’esprit dans la concentration de la méditation, nous
possédons alors la Dharma en accord
avec les Paroles du Bouddha.
7 – Les trois Dharma qui nous abaissent
– Si nous critiquons avec mépris la tradition des autres, voilà le Dharma qui nous abaisse.
– Si nous éprouvons des doutes envers notre propre doctrine, voilà le Dharma qui nous abaisse.
– Si nous pratiquons une fausse doctrine, voilà le Dharma qui nous abaisse.
8 – Les trois Dharma qui nous élèvent
– Si, pratiquant les dons, nous savons garder les vœux de la discipline, nous possédons alors le Dharma qui nous élève.
– Si, faisant preuve de patience à l’égard des personnes hostiles dans des circonstances difficiles et que nous développons l’effort, nous possédons alors le Dharma qui nous élève.
– Si, plaçant l’esprit
dans la méditation, nous connaissons sa nature véritable, nous possédons alors le
Dharma qui nous élève.
9 – Les trois Dharma qui conduisent au sommet
– Si, ayant rejeté l’attachement aux actes, nous contemplons la nature de l’esprit, alors nous possédons le Dharma qui conduit au sommet.
– Si, rejetant la dévotion envers les esprits et les divinités nuisibles, nous pratiquons les Divinités, Manifestations des Bouddha, nous possédons alors le Dharma qui conduit au sommet.
– Si nous purifions les
mauvaises tendances, alors nous possédons le Dharma qui conduit au sommet.
10 – Les trois Dharma expliqués aux différentes catégories de disciples
– Aux petits esprits, le Dharma
enseigné est celui du contrôle de l’esprit.
– Aux esprits moyens, le Dharma enseigné
est celui de la vision et sa compréhension intérieure (vision de la shunyata).
– Aux esprits excellents, le Dharma
enseigné est celui de la Réalité complète du Bouddha, seulement accessible à
l’élite.
* Cet Enseignement est diffusé dans la branche Sakyapa du Vajrayana du Dharma tibétain.
*
* *
Compte-rendu
L’importance de la vie posthume en Islâm est
donnée dans la réponse à la question de l’Ange Jibrîl apparaissant sous les
traits d’un jeune homme et demandant au Prophète Mohammad (‘as) : « Qu’est-ce que l’Imân (la Foi) ? C’est, répondit le Prophète : ‟croire en
Allâh, en Ses anges, à l’autre vie, aux prophètes et à la Résurrection (ba‘th)” ». L’arabe ba‘th rendu par résurrection
signifie suivant les contextes : envoie (l’ « envoie » dans
la mission des prophètes), l’idée d’éveiller, de sortir de la torpeur de
l’ignorance (d’où aussi l’acception idéologique de « réveil » au sens
de renouveau ou de « renaissance » propres aux réformistes). Les
Ikwân al-çafâ définissent ce terme par le réveil des corps qui sont morts, et
aussi par l’éveil des âmes endormies dans l’insouciance et l’oublie, et qui
après la mort, revivent des effets de l’ignorance.
Ce qui fait l’objet de l’étude de Meftah
sont les significations telles qu’elles sont donnés par le shaykh al-akbar
reposant sur quelques termes concernant la résurrection des morts, termes
apparaissant notamment au chapitre 64 des Futûhât,
comme : i‘âdah (restitution), ma‘âd (retour à l’existence de ce qui a
péri) et mahsûs (tangible ou
sensible).
Il existe plusieurs sens au terme ma‘âd. Pour le Kalam et le point de vue
dominant en Islâm, celui-ci doit se comprendre comme le retour à
l’ « existence » de ce qui a subi la mort. Il semble que l’on
doit entendre la destruction du composé humain et de son « corps subtil »,
puis la « re-manifestation » de l’être dans état individuel dès lors
qu’il n’a pas obtenu la Salut. Ce sens général est un équivalent exact du pretya-bhava de la doctrine hindoue.
C’est par conséquent l’interprétation et la traduction de ce terme ba‘th associé à mahsûs et ma‘âd,
c’est-à-dire l’idée de la « résurrection sensible » et de
« retour » qui est susceptible d’erreurs et de dérives.
La résurrection et ses modalités furent
longuement débattues par les falâsifah.
Meftah introduit le sujet en présentant Ibn Rush (Averroès) déclarant dans sa
réponse à l’Imâm Gazâlî que les philosophes anciens ne se sont pas prononcés
sur cette question et que les prophètes, après Mûsâ, ont été les premiers à
faire mention d’une « résurrection sensible ». Par résurrection sensible
il faut sans aucun doute comprendre que ba‘th
implique les organes des sens à la différence d’une conception de la
résurrection qui ne concernerait que l’enveloppe subtile du défunt dégagée de
toute mémoire produite par les organes sensoriels qui ont participé aux actions
passées de son existence, ce qui, métaphysiquement, est une impossibilité. Le
terme « sensible », qui semble
traduire mahsûs, utilisé par
le shaykh al-akbar signifie tangible – avec l’idée « tombant sous le
sens » ; c’est avec cette acception spéciale qu’il peut désigner
spécialement le mode subtil de la condition individuelle, à savoir son
« corps subtil ». Et nous savons avec l’ouvrage de Guénon
concernant l’Erreur spirite que le
plan subtil, au degré humain, possède des « prolongements »
insoupçonnés et indéfinis.
Cette notion de « Résurrection
sensible » ou « Résurrection des corps » et l’implication du
terme ma’âd du chapitre 64 des Futûhât aurait mérité d’avantage de
clarté. On peine en effet à comprendre ce qu’Ibn ‘Arabî veut dire ici en raison semble-t-il du choix
de certains termes par le traducteur (p. 77) : « Sache
que les gens divergent à propos de la restitution (i‘âda) dont les croyants affirment qu’il s’agit d’une résurrection
corporelle. Nous ne nous attarderons pas sur le point de vue de ceux qui
considèrent la restitution et l’ultime constitution comme chose [purement]
intelligible et immatérielle ; cette position est fausse, car elle procède
de l’ignorance (…) ; ils affirment donc le principe intelligible et nient
le principe sensible. Notre point de vue rejoint ces contradicteurs quant à
l’affirmation d’une constitution spirituelle et intelligible, non pour les
mêmes motivations mais parce que la mort de l’homme est en soi sa résurrection ;
seulement, il s’agit de la petite résurrection. C’est en ce sens que le
prophète – sur lui la grâce et la paix – a dit : ‟La Résurrection n’est
rien d’autre que l’union des âmes individuelles à l’Âme universelle ; et
tout cela je l’affirme au même titre que les contradicteurs” ». Meftah
poursuit : « Le ‟oui” adressé par Ibn ‘Arabî à Averroès
concerne cet aspect de la question ; quant au ‟non”, il se réfère aux
contradictions des spéculatifs avec les affirmations de la loi. Le Shaykh poursuit ainsi son propos :
C’est sur ce point précis que divergent les
partisans de la réincarnation, comme les autres (litt. comme ceux qui ne
l’affirme pas) ; tous sont de rationalistes, adeptes de la spéculation,
qui utilisent, en guise d’argumentation, le sens littéral des versets
coraniques et des traditions prophétiques. (…) Aucun d’entre eux n’a établi de
crédo sur la question sans parvenir à un aspect véridique. Ils ont
partiellement saisi la signification du Législateur mais il leur a manqué cette
connaissance détenue par d’autres qui confirme l’aspect sensible (mahsûs) de la résurrection corporelle,
de la nature tangible de la Balance, du pont, du Paradis et de l’Enfer.
(…) La science divine est ainsi plus étendue et plus accomplie ; la
combinaison entre l’intellect et les sens, l’intelligible et le sensible
procède d’une plus grande puissance et d’une perfection divine plus accomplie
puisqu’ainsi, Dieu conserve sur chaque espèce des possibles, l’Autorité (hukm) de [Son Nom] le connaisseur du
non-manifesté comme du manifesté et l’Autorité se Ses Noms : le Manifesté
et l’Occulté…) ». N’ayant pas le texte original de Meftah à notre
disposition, il est délicat de discerner où se situe la confusion manifeste
qu’il est impossible d’attribuer au shaykh al-akbar. Ce concept de
« réincarnation » arrive de façon incongrue et ne peut qu’engendrer
le trouble qui vient s’ajouter à celui de l’idée « matière » et
de « corps matériel » qui sont des conceptions modernes susceptibles
d’induire en erreur car, et il est important de le souligner, le concept de
« matière » n’existaient pas à l’époque d’Ibn ‘Arabî. Il est certain
qu’en utilisant une telle expression, c’est-à-dire, l’« aspect sensible de la résurrection
corporelle » envisagée de cette façon peut rendre perplexe, non seulement
sur le texte d’Ibn ‘Arabî lui-même, mais aussi sur le commentaire de Meftah
venant à la suite : « (…) Pour résumer la position du Shaykh, la constitution terrestre est
naturelle (tabî’yya) et élémentaire (‘unsuriyya) ; sa densité (kathâfa) domine sa subtilité (latâfa). La constitution dans l’Au-delà est
semblable à celle d’ici-bas : elle est
naturelle, sensible, intelligible et réunit l’âme au corps… ». Il est bien
entendu que « semblable » dans ce contexte signifie analogue.
Plus loin, à propos de Mudâwî al-kulûm,
nous trouvons encore des imprécisions dues à la traduction où il est question
de la « sphère des constellations du zodiaque », c’est-à-dire du
falak al-burûj qui est un « Ciel
sans étoile » et doit donc se traduire par : la « Sphère des
Tours zodiacales » ou « Sphère des Signes zodiacaux ». Il est
fait aussi un usage abusif du mot adepte qu’il serait préférable de réserver
aux awaliyah ou tout au moins aux shuyûkh ayant atteint un plus haut degré
que celui de la « connaissance rationnelle et spéculative » du
philosophe, fut-il Averroès lui-même.
Sachant naturellement que toute
traduction ne peut donner satisfaction sous tous les rapports, ces quelques
remarques n’entament en rien l’intérêt que l’on peut retirer de cet ouvrage.
* * *
A propos de la Résurrection des morts *
« Quant à la ‟résurrection de la chair”, ce n’est, en
réalité, qu’une façon fautive de désigner la ‟résurrection des morts”,
qui, ésotériquement (11), peut correspondre à ce que l’être qui
réalise en soi l’Homme Universel retrouve, dans sa totalité, les états qui
étaient considérés comme passés par rapport à son état actuel, mais qui sont
éternellement présents dans la ‟permanente actualité de l’être extra-temporel” »
(12)
* * *
« (...) c’est ainsi que nous avons vu tout récemment, dans une revue que nous aurons la charité de ne pas nommer, le dogme catholique de la ‟résurrection de la chair » interprété dans un sens réincarnationniste ; et encore c’est un prêtre, sans doute fortement suspect d’hétérodoxie, qui ose soutenir de pareilles affirmations ! Il est vrai que la réincarnation n’a jamais été condamnée explicitement par l’Église Catholique, et certains occultistes le font remarquer à tout propos avec une évidente satisfaction ; mais ils ne paraissent pas se douter que, s’il en est ainsi, c’est tout simplement parce qu’il n’était pas même possible de soupçonner qu’il viendrait un jour où l’on imaginerait une telle folie. Quant à la ‟résurrection de la chair”, ce n’est, en réalité, qu’une façon fautive de désigner la ‟résurrection des morts”, qui, ésotériquement (11), peut correspondre à ce que l’être qui réalise en soi l’Homme Universel retrouve, dans sa totalité, les états qui étaient considérés comme passés par rapport à son état actuel, mais qui sont éternellement présents dans la ‟permanente actualité de l’être extra-temporel” » (12).
(11) Bien entendu,
cette interprétation ésotérique n’a rien de commun avec la doctrine catholique
actuelle, purement exotérique ; à ce sujet, voir Le Symbolisme de
la Croix, 2e année, no 5, p. 149, note 4 [note 41].
(12) Voir Pages
dédiées à Mercure, 2e année, no 1, p. 35, et no 2, p. 66.
*
Palingenius, « Les néo-spiritualistes ».
* * *
« Nous ajouterons tout de suite que, si ‟le Paradis est une prison” pour certains comme nous l’avons dit précédemment, c’est justement parce que l’être qui se trouve dans l’état qu’il représente, c’est-à-dire celui qui est parvenu au salut, est encore enfermé, et même pour une durée indéfinie, dans les limitations qui définissent l’individualité humaine ; cette condition ne saurait être en effet qu’un état de ‟privation” pour ceux qui aspirent à être affranchis de ces limitations et que leur degré de développement spirituel en rend effectivement capables dès leur vie terrestre, bien que, naturellement, les autres, dès lors qu’ils n’ont pas actuellement en eux-mêmes la possibilité d’aller plus loin, ne puissent aucunement ressentir cette ‟privation” comme telle. On pourrait alors se poser cette question : même si les êtres qui sont dans cet état ne sont pas conscients de ce qu’il a d’imparfait par rapport aux états supérieurs, cette imperfection n’en existe pas moins en réalité ; quel avantage y a-t-il donc à les y maintenir ainsi indéfiniment, puisque c’est là le résultat auquel doivent aboutir normalement les observances traditionnelles de l’ordre exotérique ? La vérité est qu’il y en a un très grand, car, étant fixés par là dans les prolongements de l’état humain tant que cet état même subsistera dans la manifestation, ce qui équivaut à la perpétuité ou à l’indéfinité temporelle, ces êtres ne pourront passer à un autre état individuel, ce qui sans cela serait nécessairement la seule possibilité ouverte devant eux ; mais encore pourquoi cette continuation de l’état humain est-elle, dans ce cas, une condition plus favorable que ne le serait le passage à un autre état ? Il faut ici faire intervenir la considération de la position centrale occupée par l’homme dans le degré d’existence auquel il appartient, tandis que tous les autres êtres ne s’y trouvent que dans une situation plus ou moins périphérique, leur supériorité ou leur infériorité spécifique les uns par rapport aux autres résultant directement de leur plus ou moins grand éloignement du centre, en raison duquel ils participent dans une mesure différente, mais toujours d’une façon seulement partielle, aux possibilités qui ne peuvent s’exprimer complètement que dans et par l’homme. Or, quand un être doit passer à un autre état individuel, rien ne garantit qu’il y retrouvera une position centrale, relativement aux possibilités de cet état, comme celle qu’il occupait dans celui-ci en tant qu’homme, et il y a même au contraire une probabilité incomparablement plus grande pour qu’il y rencontre quelqu’une des innombrables conditions périphériques comparables à ce que sont dans notre monde celles des animaux ou même des végétaux ; on peut comprendre immédiatement combien il en serait gravement désavantagé, surtout au point de vue des possibilités de développement spirituel, et cela même si ce nouvel état, envisagé dans son ensemble, constituait, comme il est normal de le supposer, un degré d’existence supérieur au nôtre. »
* Ch. X : « Salut et Délivrance » (paru dans Études Traditionnelles, janvier-février 1950) ; « Recueil posthume » - Annexe aux Livres et divers : Aperçus sur l’initiation -, éditions Œuvre de René Guénon.
*
* *
ÉTUDES TRADITIONNELLES – numéro spécial consacré à RENÉ GUÉNON – Juil.- nov. 1951, Nos 293-295
Cette publication est le premier hommage
rendu au « maitre » des études traditionnelles après sa mort. Nous en
retenons seulement trois contributions :
- RENÉ GUÉNON PRÉCURSEUR
Tous ceux qui ont connu René Guénon et
qui, par leur compréhension attentive et fervente, ont gagné de l’entendre
converser et parler, tous ceux-là possèdent mieux que les autres, le rare et
précieux privilège de pouvoir retrouver, en relisant son œuvre, tous les
aspects d’une pensée qui fut et qui demeure constamment rattachée à
l’« essence inaltérable de ces principes suprêmes immuablement contenus
comme il l’écrit lui-même, « dans la permanente actualité de l’intellect
divin ». Il suffit, en effet,
d’ouvrir l’un de ses livres et d’y lire au hasard, pour se rendre compte à quel
point René Guénon avait le sens de l’harmonie universelle et totale, de cette
harmonie qui reflète dans la multiple diversité du monde et de la vie
l’éternelle présence de l’immobile unité. Ainsi placé au vrai « Centre du
Monde », au cœur vivant de toute initiation valable, René Guénon, avec une
fermeté de pensée, une solidité de doctrine, une clarté d’expression et une
rare puissance de logique et de
pénétration, a consacré sa vie à nous faciliter l’accès à tous les temples où
se conserve encore dans l’univers
entier, la lumière de l’Esprit et de la Connaissance.
Or, pour accéder à cette Connaissance
transcendante et divine, René Guénon ne cesse de répéter, et c’est là un de
points essentiels qui donne à son message sa valeur effective, qu’elle ne peut
être obtenue que par un effort strictement personnel. Les instructeurs, les
mots et les écrits peuvent nous guider sans doute, nous servir de
« support », mais, rigoureusement incommunicable, la Connaissance
initiatique et suprême ne peut être atteinte seulement que par soi-même. Pour
le parfait initié, la véritable sagesse ne consiste donc pas à cultiver
l’illusoire vanité du savoir profane, d’encombrer sa mémoire d’idées plus ou
moins fausses cueillies au champ d’autrui, mais à développer cette puissance de
connaissance intérieure contre laquelle nulle force brutale ne saurait
prévaloir. Cette puissance est supérieure à l’action et à tout ce qui passe.
Etrangère au temps, elle est la conscience vivante de l’infrangible et sereine
unité et la garant de notre éternité.
Aussi, faut-il saluer en René Guénon un
précurseur, dans le monde occidental, de cette renaissance des forces
spirituelles dont il a tant besoin pour se régénérer, pour se purifier de toutes
les erreurs qu’accumule dans les âmes, cet infernal artisan de désordre, de
nausée et de désespérance qui est le matérialisme de la pensée moderne.
Nous savons toute l’énorme influence
qu’a l’œuvre guénonienne pour contribuer à former cette élite intellectuelle
nouvelle dont l’action peut encore assumer le salut de l’homme et la libération
du monde menacé.
« Vincit Omnia
Veritas ».
Mario
Meunier
- Luc Benoist : PERSPECTIVES GÉNÉRALES
Après avoir rendu compte de l’œuvre par
un résumé de chacun de ses ouvrages, Benoist conclue : « (…)
Sans doute est-il difficile de dire quel sera le destin historique de René
Guénon. Il suivra sans doute dans son aspect formel le destin de la langue et
de la culture dont cette langue fut l’expression. Mais ce qui est certain,
c’est que nulle œuvre humaine ne s’est assurée en elle-même une garantie plus
sûre de survie, par son attachement intégral à ce qui est la Vérité ».
- Michel Vâlsan : LA FONCTION DE RENÉ GUÉNON ET LE SORT DE L’OCCIDENT
Il est beaucoup question de « fonction », de l’état et du déclin du christianisme et de la « constitution de l’élite ». Au sujet des « réflexions » concernant les possibilités de la constitution de l’élite, Vâlsan leur reconnait, au terme de son long développement, « un caractère trop hypothétique et abstrait », mais néanmoins il était important, précise-t-il, de les avoir formulé pour tenter de « circonscrire d’une façon très générale la signification » que pouvait avoir « la cessation, à ce moment, de la fonction personnelle de Guénon ». En effet, les indications de Guénon données par correspondance à Vâlsan ont joué pour lui un rôle décisif, notamment pour ce qui concerne la prise d’indépendance de sa tariqah à l’égard du groupe shuonnien. Cependant, si elles cessèrent avec sa disparition, l’œuvre de Guénon restait. À propos de cette correspondance, le fait qu’elle soit maintenue « sous le boisseau », laisse supposer qu’elle ne doit pas revêtir une grande importance et sans doute aucune information autres que celles qui ont permis à Vâlsan de développer les éléments présents dans cet hommage et dans son autre articles qui semble lui faire suite, « L’Islâm et la fonction de René Guénon » (publié dans Études Traditionnelles, janv.-fev.1953).
Il faut reconnaitre que cinquante années plus tard, si le « sort de l’Occident » s’est encore irrémédiablement enfoncé dans la « barbarie », voire la démence, beaucoup de choses imprévisibles au début des années cinquante se sont modifiées de telle sorte qu’aujourd’hui, les conditions de la présence des vérités traditionnelles et surtout leur accès initiatique en Occident, n’ont plus grand chose à voir avec celles qui prévalaient à l’époque de Guénon.
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